Au cours de mes 25 années de carrière dans les secteurs public et privé, j’ai eu des tas de bureaux différents : petits et grands, parfois mobiles, en hauteur ou au niveau du sol, voire de la mer, avec vue sur le fleuve ou au contraire sur un mur, certains dans lesquels j’étais seul pendant que j’en partageais d’autres. Ils étaient tous différents, mais avaient pourtant une caractéristique commune évidente mais qui change tout lorsqu’on s’y attarde : je devais m’y rendre pour travailler.
Alors, comme tout employé, je m’y suis rendu : le plus souvent possible à pied, souvent en moto, en voiture ou en transports en commun. Les plus proches ne me demandaient guère plus de quelques minutes de marche, les plus éloignés jusqu’à une demi-heure de route, j’ai toujours choisi par commodité d’habiter près de là où je travaillais.
L’une des solutions idéales, professionnellement parlant, a justement été d’habiter et de travailler au même endroit, en l’occurrence une école militaire, une base aéronavale ou un porte-avions. On ne pouvait faire plus court comme temps de trajet, mais j’ai découvert dans l’expression « vivre sur son lieu de travail » l’incarnation même d’un oxymore.
En quittant le monde des compagnies multinationales en 2014, je me suis mis à la recherche d’une activité ne nécessitant plus d’aller chaque jour au bureau dans une perspective à long terme, puisqu’Anna et moi étions résolus à passer une partie de l’hiver à l’extérieur du Canada. J’ai d’abord pris des cours de photo, mais me suis malheureusement révélé un artiste suffisamment moyen pour ne pas espérer dépasser le stade de l’amateur averti. Les activités de conseil fonctionnaient également, si ce n’est que les efforts de promotion d’une compagnie, fût-elle la mienne, n’étaient pas ma tasse de thé. Vint alors l’idée d’aller travailler au soleil à plein temps pour ne plus avoir à se soustraire à l’hiver canadien, mais avoir les pieds dans le sable et le cœur à Montréal ne résolvait pas la question du bureau.
Finalement, je me suis mis à écrire sérieusement il y a près de deux ans, au cours de mes études à l’ÉNAP suivies d’une excellente année au Grand quartier général de la SQ, lorsque je n’étais pas… au bureau.
J’ai longtemps rédigé depuis le disque dur de mon Mac, à la maison. Puis, grâce au Cloud, dans un café, parfois sur un banc dans un parc ou sur une chaise Adirondack le long du canal Lachine. Dans le bus, sur Pages pour iPhone. Voire même en marchant dans la rue, lorsqu’une nouvelle idée me venait soudain. Je découvrais alors, avec stupéfaction, la flexibilité du nomadisme digital.
Aujourd’hui, j’écris avec un iPad en équilibre sur les genoux et une tasse de café posée sur la table basse, m’arrêtant de temps en temps pour contempler le vert des palmiers, l’eau calme des canaux et un ciel magnifique dont le bleu brille des premières lueurs du matin. Au détour des conversations sur nos futures activités hivernales, Anna m’a fait réaliser que la question du bureau était finalement devenue obsolète : « Peu importe où tu te trouves pour écrire du moment que tu as une connexion internet, non ? ».
Désormais nomade assumé, j’ai dû lui avouer que c’était encore mieux que ce qu’elle pensait : en réalité, pour travailler sur la plupart des composantes d’une fiction, un coin de nappe et un stylo suffisent. Et avec un café, c’est juste parfait.
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